Le court-métrage “Souviens-moi” a été écrit et réalisé par Nathan Pomares pour le Nikon Film Festival 2020 sur le thème “Une génération”. C’est avec beaucoup de maturité et d’intelligence, que le jeune réalisateur a proposé une vision très touchante de la mémoire, du déni et de la transmission inter-générationnelle. De par l’histoire personnelle de mes grands-parents, j’ai été particulièrement touchée par son projet, et heureuse de pouvoir m’y associer en tant que comédienne.
Dans son court-métrage, Nathan Pomares met en lumière Madame Szemberg* qui a connu l’horreur de la Seconde Guerre Mondiale, alors qu’elle n’était qu’une petite fille. Pour reconstruire sa vie après la guerre, elle passe par un rejet de ces souvenirs. Pour expliciter ce phénomène, le jeune réalisateur s’appuie sur l’analyse d’Henry Rousso. L’historien explique qu’après un traumatisme, la mémoire se déconstruit en trois phases. Après une période de déni (amnésie), vient le temps de l’anamnèse avec une prise de conscience progressive sur le passé refoulé. Enfin advient, la troisième étape : l’hypermnésie dans laquelle le traumatisme occupe une place grandissante dans la mémoire. Le personnage central de “Souviens-moi”, Madame Szemberg traverse ce cycle mémoriel. C’est seulement, à l’issue de la dernière phase, qu’elle décide de transmettre son histoire aux jeunes générations.
L’histoire racontée par Nathan a fait écho à la mienne. Ma grand-mère, Władysława Kochanowska a été prisonnière dans le camp de concentration de Ravensbrück (Allemagne). À la fin de la guerre, elle est rentrée à Varsovie, où elle a reconstruit sa vie. Ma grand-mère m’a transmis énormément d’amour. C’était un océan de bonté, de tendresse, de gentillesse et d’humilité. Elle ne se plaignait jamais et abordait chaque jour avec sourire. J’étais bien trop petite pour comprendre ce qu’elle a enduré pendant la guerre. Mais, j’ai toujours été émerveillé par sa joie de vivre. Un jour, j’étais tombé sur un extrait d’un journal de 1939 dans ses affaires, elle m’a alors raconté quelques souvenirs de ces mois vécus dans le camp. Je n’avais que douze ou treize ans, et ne pouvais comprendre, mais étrangement, je me souviens très bien de ce qu’elle m’avait raconté. Le temps de grandir, de prendre conscience qu’il s’agit également de mon passé, il était trop tard. Aujourd’hui, en plein questionnement de mes origines, et de celles de ma famille, j’investigue sur notre passé. Lorsque récemment j’ai fait part des mes interrogations à ma maman, j’ai compris qu’elle-même n’a pas eu le temps de poser les siennes à sa mère. Déni, pudeur, peur sont certes autant d’obstacles qui empêchent la parole de se libérer. Mais, pour que la parole puisse se libérer, il faut aussi le bon moment pour celui qui l’écoute. Le bon temps pour l’entendre.
Pour réaliser son court-métrage, Nathan Pomares, a su s’entourer d’une belle équipe : Ewunia Adamusinska-Vouland (actrice), Mireille Cyvoct (actrice), Lola Roux (actrice), Késiane Rieux (figurante), Léo Schmidt (co-réalisateur), Nicolas Carano (preneur son), Ines Arrighi (scripte et figurante), Chérihane Roubaoui (lumières), Lilian Damignani, (making of), Chloé Sbernini (photos), Christine & Jean Pierre Guerin M. Senault de l’hôpital d’Hyères.
Ce beau projet a été apprécié du public et a bénéficié d’une belle visibilité dans le cadre du Nikon Film Festival 2020. Devant Nathan Pomares, se dessine un bel avenir de réalisateur. N’hésitez pas à vous abonner à sa chaîne YouTube pour découvrir ses courts-métrages et vidéoclips.